Journaliste et directeur du (Journal des débats, Louis-François Bertin (1766-1841), dit Bertin l’Aîné, est un partisan de la monarchie constitutionnelle qui marqua la vie politique française sous l’Empire jusqu’à la Monarchie de juillet.
En 1832, Jean-Dominique Ingres réalisa son célèbre Portait de Bertin (Paris, musée du Louvre) en qui Edouard Manet vit un symbole : « M. Ingres a choisi le père Bertin pour styliser une époque : il en a fait le bouddha de la bourgeoisie cossue, repue, triomphante ». En 1803, lorsque Fabre fit à Florence la connaissance de Bertin, celui-ci n’était pas encore l’homme puissant et le patron de presse influent que l’on sait. C’était, comme le peintre, un exilé victime des événements et de ses opinions : Bertin fut accusé par Bonaparte de préparer un complot monarchiste. Après un an passé à la prison du Temple, il fut condamné à l’exil et ne regagna la France qu’en 1805.
Trente ans avant le chef-d’œuvre d’Ingres, le Bertin de 1803, sous le pinceau de François-Xavier Fabre, n’est qu’élégance et discrétion. Mais on devine la même mâchoire forte, le même nez long et fin. L’expression est concentrée, comme méditative, et une certaine tristesse émane de cette image un peu figée, peut-être terminée en l’absence du modèle (in L. Pellicer, François-Xavier Fabre, de Florence à Montpellier, 2008, p. 256). Une autre image de l’homme d’affaire nous est connue à travers un portrait dessiné par Anne-Louis Girodet (New Yok, Metropolitan Museum of Art), auquel Bertin commanda en 1808 le célèbre tableau Atala au tombeau (Paris, Musée du Louvre).
Les relations entre Bertin et Fabre furent très amicales. Mais à plusieurs reprises Bertin tenta de détourner Fabre de son projet de donation à sa ville natale et de l’attirer dans la capitale. Il écrivit au peintre ces mots devenus fameux : « Vous fonderez à Montpellier une très belle galerie, mais non pas des yeux pour la voir. La peinture succombera sous la médecine ». Aujourd’hui, Bertin et son épouse (Portrait de Geneviève Aimée Victoire Bertin, inv. 2012.11.2) rejoignent les collections du musée Fabre fondé en 1825. Elles s’enrichirent dès 1837 d’une Vue prise dans les Apennins sur le sommet du Mont Lavernia du peintre Edouard Bertin, fils du couple, qui fut élève d’Ingres et reçut pas Fabre à Florence en 1821.